Adventices
Leviers de gestion des adventices
Potentiel d'infestation - Labour
Mode d'action
Le labour est un travail du sol avec retournement profond de 20 à 25 cm.
Son mode d’action sur les adventices repose sur 3 principes :
- L’enfouissement des graines d’adventices qui entraîne le plus souvent leur incapacité à germer ou à lever
- Une diminution de la densité de levées des adventices par effet de dilution des graines sur la profondeur travaillée, et la destruction des adventices déjà germées
- Une perte de viabilité des graines dans le temps, les graines enfouies subissant les attaques du milieu. Cette perte de viabilité diffère fortement entre espèces d’adventices.

Les graines d’adventices sont réparties dans tout l’horizon travaillé avec une concentration supérieure dans les centimètres les plus profonds.
Attention, environ 10 % des graines restent dans les 5 premiers centimètres, profondeur compatible avec l’émergence de nombreuses adventices.
Efficacité et pertinence

Dans cette étude, la parcelle a été conduite en non-labour pendant 17 ans dont 7 ans en ACS (Agriculture de Conservation des Sols). Le blé labouré présente une densité adventice réduite de deux tiers par rapport au blé en travail du sol superficiel.
Et pour les systèmes de culture en non-labour permanent ?
Le labour est un moyen de gestion efficace des adventices, mais il est possible de s’en passer. D’autres modes d’action (éviter les germinations et atténuer le développement des adventices) sont alors mobilisés. Ils se concrétisent par une utilisation accrue des autres moyens agronomiques (rotation plus diversifiée, semis direct…).
Adventices cibles
Le labour ne présente pas la même efficacité selon les adventices considérées. Les paramètres en jeu sont :
- La profondeur d’émergence : La plupart des adventices n’ont pas les réserves suffisantes pour lever en-deçà de 5 cm de profondeur. Le poids de la graine est un bon indicateur de la quantité de réserves. Le labour est ainsi peu efficace sur les grosses graines, comme le datura stramoine ou la folle-avoine.
- La viabilité des graines d’adventices dans le sol au cours du temps : Cette viabilité est expliquée en grande partie par la taille de l’enveloppe. Les adventices avec une enveloppe fine persistent peu dans le sol, alors que celles avec une enveloppe épaisse persistent plus longtemps. Le labour est ainsi efficace pour les adventices avec une enveloppe fine, ce qui est le cas de la plupart des graminées. L’indicateur couramment utilisé est le Taux Annuel de Décroissance (TAD).

Efficacité de la pratique selon l'adventice ciblée

Concernant les vivaces, le labour perturbe également le développement des rhizomes avec une efficacité néanmoins beaucoup plus aléatoire et variable selon les adventices. Il peut être positionné après les déchaumages spécifiques à la gestion des vivaces, pour enfouir les fragments et les épuiser. Dans le cas du rumex, il peut être contreproductif en rendant difficile l’extraction des racines.
Optimisation des réglages de la charrue pour la gestion des adventices
- Importance du réglage de la rasette (distance entre le soc et la rasette et position longitudinale des supports) pour un bon enfouissement des graines superficielles

- Limitation de la vitesse d’avancement à < 10 km/h afin d’éviter un mauvais enfouissement des graines et leur positionnement sur le haut des bandes de labour, entrainant un reverdissement

Observations clés
Reverdissement : une bonne idée pour estimer l’infestation, et la qualité du labour, observer l’enherbement sur la zone entre deux raies de charrue en sortie hiver
Fréquence et positionnement du labour dans la rotation
Le labour ne doit pas être systématique, mais alterné. Cette alternance dépend de la flore problématique de la parcelle et de la succession culturale. Dans un objectif de gestion de la flore adventice, il s’agit d’avoir un délai de retour du labour correspondant à la durée de perte de viabilité par enfouissement des graines d’adventices.
Rotation 1 :
Illustration d’un labour positionné de façon à gérer les graminées automnales avec un délai de retour tous les 4 ans.

Rotation 2 :
Illustration d’un labour positionné avant l’implantation des cultures de printemps, dans un objectif premier de structure du sol. Deux points de vigilance : (1) le délai de retour du labour est un peu juste pour la perte de viabilité des graines de graminées (encore plus pour les dicotylédones), (2) L’implantation du blé après les récoltes tardives nécessite certaines années un labour, réduisant encore le délai de retour.

Synthèse
- Le labour est un levier de gestion des adventices éprouvé :
- pour des espèces qui ont une faible viabilité dans le sol
- à l’exception de celles qui sont capable d’émerger au-delà de 5 cm de profondeur
Les graines ne sont pas toutes enfouies en profondeur, il en reste dans l’horizon superficiel souvent repris à la préparation du semis.
- L’efficacité du labour sur la pression adventice dépend des modalités de mise en place : réglage de la charrue et fréquence/position dans la rotation
- Plus largement que la gestion adventice, le labour :
- Augmente la durée de la fenêtre d’intervention pour les semis en cas d’humidité de surface, en comparaison avec le non-labour
- Réduit le risque de certaines maladies : fusariose, piétin…
- Nivelle le sol et enfouit les résidus
MAIS :
- Dilue la matière organique si le labour est réalisé en profondeur
- Peut créer une semelle de labour
- Est consommateur de temps et de carburant
Sommaire

Pour aller plus loin
Protocole d’observation des annuelles
Protocole d’observation des vivaces

La biologie des adventices ciblées par cette pratique
Références bibliographiques
Brun. 2017. Travail du sol – Bien régler sa charrue. Arvalis (https://www.arvalis.fr/infos-techniques/bien-regler-sa-charrue)
Chauvel, H. Darmency, N. Munier-Jolain et A. Rodriguez, coord. 2018. Gestion durable de la flore adventice des cultures. Editions Quae
Colbach, C. Durr, J. Roger-Estrade, B. Chauve, J. Caneill , 2006. AlomySys: Modelling black-grass (Alopecurus myosuroides Huds.) germination and emergence, in interaction with seed characteristics, tillage and soil climate
Cordeau, A. Baudron, P. FARCY , B. Pouilly, B. Mosa, P. Chamoy, G. Adeux. 2019. Et si une impasse de désherbage en agriculture de conservation des sols poussait à retravailler le sol ? Quelle intervention choisiriez-vous ? Végéphyl – 24ème conférence du COLUMA