Adventices
Leviers de gestion des adventices
Evitement - Décalage date semis
Mode d'action
Le décalage de la date de semis est un levier d’évitement.
Il s’agit d’éviter une opération de travail du sol au cours d’une période où les graines de l’adventice considérée sont non-dormantes.
Ce décalage est surtout réalisé pour les céréales, semées plus tardivement à l ’automne. Il peut aussi être réalisé sur colza, en le semant plus tôt.
C’est un levier majeur dans la lutte contre les adventices, car la date de semis a un impact fort sur l’infestation initiale de la parcelle.
Pour les cultures de printemps, la technique est plus difficile à mettre en place : les adventices présentes ayant une période de levées préférentielles plus étalée.
Adventices cibles

Les adventices avec des périodes de levées marquées sont plus sensibles à cette pratique, comme par exemple le vulpin, le brome …
Pour les espèces avec des levées étalées sur toute l’année, comme la matricaire, la pratique est moins pertinente
Efficacité du décalage pour les céréales d'hiver
Selon les espèces considérées, la diminution des densités d’adventices varie de -38 à -72% avec un semis tardif à l’automne. L’effet est plus marqué pour des adventices telles que le vulpin, le ray-grass ou le brome stérile grâce à leur pic de levée étroit

Quel décalage viser ?

Sur ce tableau, l’effet du décalage est estimé par la probabilité (% d’années) d’avoir une diminution ou une augmentation de la levée d’adventices par rapport à la levée qui aurait eu lieu si le semis avait été effectué le 3 octobre.
On voit qu’un décalage du semis de blé à début novembre (+27 jours) permet de sécuriser la diminution du nombre de levées d’adventices, alors que les dates précédentes sont plus aléatoires dans leurs résultats.
Combinaison avec les faux semis
Intérêt de combiner le travail superficiel du sol en interculture et le retard de la date de semis sur l’infestation de vulpin dans une culture de blé
Modalités | Date de semis du blé | nombre de plante/m2 (75% de vulpin) | Biomasse adventices en g/m² | ||
le 13/12 | le 28/02 | le 11/03 | |||
0 déchaumages | Semis combiné | 23/10 | 22.3 | 24.9 | 59.6 |
2 déchaumages | Non labour | 23/10 | 14.6 | 26,5 | 10.4 |
2 déchaumages | Non labour + semis décalé | 04/11 | 8.8 | 17.8 | 2,6 |
0 déchaumages | Labour superficiel + semis retardé | 04/11 | 5.8 | 15.2 | 2.2 |
Essai réalisé en 2003-2004 à Laversines (60) par Agro-Transfert Ressources et Territoires et la Chambre d’Agriculture de l’Oise
La réalisation de deux déchaumages avant le semis du blé, en comparaison à un semis direct, a permis de diminuer la densité d’adventices et de façon plus importante la biomasse produite. Cela permet de diminuer le risque d’échec de désherbage et le risque de production de graines d’adventices.
En combinant le déchaumage avec le retard de la date de semis du blé ou le labour et le retard de semis, l’effet est encore plus important.
Et pour les cultures de printemps ?
Pour les cultures de printemps, la technique est plus difficile à mettre en place : les adventices présentes sont moins sensibles. De plus, le cycle des cultures étant plus court, l’impact sur le rendement peut être important si le semis est trop décalé.
Ce décalage est peu mis en place, vu les contraintes pour les semis de printemps, mais il semblerait qu’il faille envisager un retard modéré (10-15 j), et en profiter pour réaliser un faux semis, les conditions printanières étant en général idéales pour la levée des adventices avec comme point de vigilance l’humidité : il ne faut pas dessécher les sols pour les semis.

Et pour le colza ?
A l’inverse des céréales, la date de semis pour le colza se décale vers l’avant : on va plus chercher un semis début aout, pour éviter les pics de certaines adventices comme les vulpins ou ray-grass… .
On peut néanmoins voir apparaitre une flore plus printanière, comme les chénopodes et mercuriales, qui lèveront mais ne passeront pas l’hiver.
De plus, un colza semé tôt aura un développement rapide, qui lui permettra de couvrir plus vite le sol, et qui aura des avantages autres : meilleure résistance aux altises, …
Néanmoins, il faut être vigilant concernant le risque d’élongation, avec les variétés sensibles et/ou semées trop denses, et sur une potentielle faim d’azote sur les sols à faible disponibilité
Risques et mise en œuvre pour les céréales d'hiver
Le risque principal, qui constitue le frein à l’utilisation de cette pratique, est de ne pas pouvoir semer à l’automne pour les céréales. En attendant pour semer, on risque de passer à côté des créneaux disponibles, et de se retrouver avec des conditions rendant impossible le semis sur toute ou partie des surfaces de céréales à paille.
Une autre limite est la potentielle perte de rendement avec le décalage : elle variait d’un extrême de -27 qx/ha pour un mois de décalage à -8 qx/ha pour 10 jours de décalage, ou d’environ -8% de pertes de rendement en blé selon les sources consultées. Ces données sont un peu anciennes, et actuellement, avec le progrès variétal, les semis tardifs présentent des écarts de rendement beaucoup moins prononcés qu’auparavant
Cette perte importante de rendement peut faire peur, mais elle représente des situations extrêmes avec des variétés non adaptées. Il faudra donc faire un choix de variétés adaptées (précoces à floraison), pour gommer ce risque.
La densité de semis est à augmenter, pour compenser les pertes , en lien avec le contexte pédoclimatique et la variété choisie.
Sommaire

Pour aller plus loin
Protocole d’observation des annuelles
Protocole d’observation des vivaces

Adventices ciblées par cette pratique
Références bibliographiques
- Arvalis,2024 : Choisir et Décider, préconisations régionales campagne 2024-2024
- Colbach , 2016 : Rapport final – Analyse et modélisation des effets des pratiques agricoles sur les services et disservices écosystémiques dépendant des adventices – Application à l’évaluation et la conception de systèmes de culture économes en herbicides
- Colbach N., Dürr C., Roger-Estrade J. & Caneill J. (2005) How to model the effects of farming practices on weed emergence.
- Colbach , 2019 : Du champ virtuel au champ réel – ou comment utiliser un modèle de simulation pour diagnostiquer des stratégies durables de gestion des adventices et reconcevoir des systèmes de culture ?
- Perspectives Agricoles, oct 2016, p23-25
- Lheureux et al, 2008 : Huit fermes de grande culture engagées en production intégrée réduisent les pesticides sans baisse de marge
- Agrobook 2023, TEREOS