Le chiendent n’est pas l’adventice vivace la plus fréquemment observée chez les agriculteurs biologiques, mais il est fréquemment observé dans les parcelles et sa capacité de concurrence est importante. Des leviers d’action existent et permettent de le maîtriser dans la succession culturale.
Habitat
Types de sols : Le chiendent rampant a une préférence pour les sols frais, argileux, à pH neutre ou légèrement basiques, mais se développe bien dans tous types de sols.
Caractéristiques biologiques
Le chiendent appartient à la famille des poacées.
Il est muni de feuilles au limbe étroit, caractérisées par la présence d’oreillettes et d’une courte ligule située à la base du limbe. Le chiendent possède une inflorescence formée d’épillets aplatis et placés parallèlement à l’axe central de l’inflorescence.
Le chiendent dispose d’un système racinaire très superficiel. La répartition des organes souterrains du chiendent dans le sol dépend du travail du sol.
En l’absence de travail du sol ou avec un travail du sol inférieur à 10 cm de profondeur, les rhizomes restent à la surface du sol.
En situation de parcelle labourée, les rhizomes se situent dans la couche labourée.
Ne pas confondre avec le ray-grass :
Le chiendent est reconnaissable à la forme de ses épis et à l’insertion des tiges…
…mais aussi à ses rhizomes en forme de dent :
Cycle de reproduction
> Reproduction par les graines
La propagation par les graines est minime, car les semences sont souvent stériles et les germinations sont rares.
- Période de levée : Printemps - Été
- Profondeur de germination : jusqu'à 5 cm
- Mode de levée : échelonné
- Quantité de semences produites : faible (faible viabilité)
- Durée de vie des graines : jusqu'à 4-10 ans
> Reproduction végétative
La propagation par les graines est minime, car les semences sont souvent stériles et les germinations sont rares.
Multiplication végétative :
Le chiendent est une vivace de rhizomes.
Une même plante peut produire jusqu'à 150 rhizomes en une année. La production de rhizomes est possible si les températures sont comprises entre 2°C et 30°C.
Les rhizomes du chiendent possèdent des bourgeons végétatifs. Les bourgeons terminaux, aussi appelés bourgeons apicaux, situés à l’extrémité des rhizomes, sont les seuls bourgeons capables de former de nouvelles pousses.
C’est la remontée des rhizomes vers la surface qui permet la formation de nouvelles pousses de chiendent. Parmi les autres bourgeons végétatifs, la majorité reste en dormance et certains produisent de nouveaux rhizomes, permettant l’expansion du système racinaire.
- Capacité à produire des rhizomes : à partir du stade 3-4 feuilles
- Période de levée des tiges aériennes : au printemps (à partir du dégel) et à l'automne
Régénération des fragments racinaires :
Si le système racinaire est fragmenté, les bourgeons végétatifs situés sur les fragments racinaires sortent de dormance pour produire de nouvelles pousses et permettre de reformer de nouvelles plantes. Ce processus est appelé la « régénération » des fragments racinaires.
Le chiendent peut se régénérer à partir du stade 3-4 feuilles.
Stockage des réserves racinaires
Les réserves racinaires du chiendent sont au minimum à l'époque de la floraison (juin-juillet) et au maximum à l'automne.
Références bibliographiques :
BOND W., DAVIES G., TURNER R.J. ; 2007. The biology and non-chemical control of common couch (Elytrigia repens (L.) Nevski).
DUVAL J. ; 2005. Moyens de lutte au chiendent (Elytrigia repens) en production biologique.
ITAB ; 2005. Maîtriser les adventices en grandes cultures biologiques.
HÅKANSSON S.; 2003. Weeds and Weed Management on Arable Land: An Ecological Approach.
REIDY M.E., SWANTON C.J. ; 1993. Ontario, ministère de l’agriculture et de l’alimentation : le chiendent (quackgrass). Fiche technique.
WERNER P.A., RIOUX R. ; 1977. The biology of Canadian weeds. 24, Agropyron repens (L.) Beauv. Canadian Journal of Plant Science, n°57, p.905-919.
Cultures concurrentielles
Étouffement par des cultures annuelles et pluriannuelles
La luzerne n’est pas efficace : le chiendent supporte les fauches, il est capable de s’y développer. En revanche, l’implantation de cultures à couvert dense comme le chanvre, l’avoine, l’avoine-pois, l’avoine-vesce ou le seigle, aident à maîtriser le chiendent.
Etouffement par des couverts d’interculture
Le semis de couverts d’interculture permet de limiter le développement du chiendent (Melander et al., 2003) :
- Couverts efficaces : Mélange radis-fourrager - ray grass d'Italie, sarrasin si semis successifs (voir au-dessous)
- Couverts non efficaces : trèfle violet, ray-grass anglais, mélange trèfle violet - ray-grass anglais
Les couverts de légumineuses sont à éviter car le chiendent utilise l’azote libéré par les légumineuses, après leur destruction, pour se développer. Semés à la suite d’interventions mécaniques, les couverts améliorent la maîtrise du chiendent.
Au Canada, en cas de très fortes infestations, le chiendent est maitrisé avec le semis successif de 2 couverts de sarrasin et d’un couvert d’avoine-moutarde :
Au printemps suivant, après destruction de l’avoine-moutarde, aucun rhizome viable n’a été retrouvé. (source : CETAB)
Travail du sol d’interculture
Le moyen le plus efficace sur le chiendent reste le travail du sol en été car la croissance de ses rhizomes est ralentie à cette période de l’année.
Déchaumages
1) Stratégie d’extraction
Pour fragmenter les rhizomes et les extraire du sol, il est possible d’utiliser deux outils différents ou un outil ayant les deux fonctions :
- Fragmenter les rhizomes : Déchaumeurs à seoc pattes d'oies, cover crop, herse rotative
- Extraire les fragments de rhizomes : chisel, vibroculteur, cultivateurs à dents incurvées vers l'avant, Barre désherbeuse ® Morris
- Fragmenter et extraire les rhizomes : Glyph-o-mulch®, Kvik-Up®, CMN “couch grass killer”®, cultivateur rotatif à axe horizontal (type Rotavator®)
D’après un essai réalisé par Arvalis-Institut du végétal, le Glyph-o-mulch® est l’outil le plus efficace pour fragmenter et extraire les rhizomes de chiendent :
Cependant, l’inconvénient des outils à action combinée est leur vitesse lente d’intervention. Si les conditions climatiques ne permettent pas le dessèchement des rhizomes de chiendent, il est conseillé de ramasser les rhizomes à la herse étrille après extraction pour éviter qu’ils ne se réimplantent dans le sol.
2) Stratégie d’épuisement :
Il est conseillé de réaliser au moins 3 déchaumages successifs espacés de 2 à 3 semaines. Le premier déchaumage doit être effectué dès la récolte, puis à chaque fois que les repousses de chiendent atteignent le stade 2-3 feuilles.
Les déchaumages doivent être superficiels (moins de 10 cm), car les rhizomes de chiendent sont peu profonds. Pour adapter la profondeur de travail du sol, il est possible de creuser pour voir à quelle profondeur sont situés les rhizomes de chiendent.
Labour
Un labour d’automne permet d’enfouir les rhizomes à une profondeur où leur repousse est limitée et de ralentir la repousse du chiendent au printemps suivant. Cependant, le labour seul aboutit rarement à la destruction totale du chiendent.
Bien positionner le labour post moisson pour optimiser l’efficacité :
Si le labour est effectué immédiatement après la récolte, les rhizomes enfouis risquent de ne pas être touchés par les déchaumages.
Un agriculteur du réseau Agri-Bio a réalisé des labours sur sol gelé, aucun chiendent n’a réapparu depuis. Le gel a un effet de dessèchement des racines, similaire à celui de la sécheresse.
Gestion mécanique en culture
Binages
L’implantation de cultures sarclées peut ralentir le développement du chiendent, à condition que le niveau d’infestation du chiendent soit modéré et que le binage soit réalisé régulièrement. Néanmoins cette technique a un effet limité
Références bibliographiques :
BOSTRÖM U, FOGELFORS H, 1999. Type and time of autumn tillage with and without herbicides at reduced rates in southern Sweden. Soil & Tillage Research, n°50, p.283-293.
BRANDSÆTER LO, GOUL THOMSEN M, WAERNHUS K, FYKSE H, 2012. Effects of repeated clover undersowing in spring cereals, and stubble treatments in autumn on Elymus repens, Sonchus arvensis and Cirsium arvense. Crop protection, n°32, p.104-110.
DUVAL J, 2015. 3 essais sur 3 ans de répression du chiendent. Colloque Bio pour tous !, Canada, 5-7 mars 2015.
HÅKANSSON S, 1982. Chapter 11: Multiplication, growth and persistence of perennial weeds. In: HOLZNER W, NUMATA M, 1982. Biology and ecology of weeds.
KHORCHANI R, 2013. Désherbage mécanique du chiendent dans une prairie. Mémoire de fin d’études : Université de Laval (Canada).
MELANDER B, RASMUSSEN IA, BERTELSEN I, 2003. Integration of Elymus repens control and post harvest catch crop growing in organic cropping systems. 3ème conférence EWRS : Italie, 19-23 Juin 2003.
RINGSELLE B, 2015. Resource efficient control of Elymus repens. Thèse de doctorat : SLU (Suède).
VACHER C, POTTIER M, 2013. Contrôle des vivaces: Gestion mécanique du chiendent en interculture. Tech&Bio: 18-19 septembre 2013.