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Adventices

Potentiel d'infestation - Labour

Mode d'action

Le labour est un travail du sol avec retournement de l’horizon sur 20 à 30 cm.

Son mode d’action sur les adventices repose sur 4 principes :

  • La destruction des plantes déjà levées par enfouissement
  • L’enfouissement des graines d’adventices à des profondeurs incompatibles avec la germination ou la levée (Munier-Jolain N. 2018)
  • Une diminution de la densité de levées des adventices par effet de dilution des graines sur la profondeur travaillée
  • Une perte de viabilité des graines dans le temps, les graines enfouies subissant les attaques du milieu. Cette perte de viabilité diffère fortement entre espèces d’adventices.

Adventices cibles

Le labour ne présente pas la même efficacité selon les adventices considérées. Les paramètres en jeu sont :  

  • La profondeur d’émergence : La plupart des adventices n’ont pas les réserves suffisantes pour lever en-deçà de 5 cm de profondeur. Le poids de la graine est un bon indicateur de la quantité de réserves. Le labour est ainsi peu efficace sur les grosses graines, comme le datura stramoine ou la folle-avoine.
  • La viabilité des graines d’adventices dans le sol au cours du temps : Cette viabilité est expliquée en grande partie par la taille de l’enveloppe. Les adventices avec une enveloppe fine persistent peu dans le sol, alors que celles avec une enveloppe épaisse persistent plus longtemps. Le labour est ainsi efficace pour les adventices avec une enveloppe fine, ce qui est le cas de la plupart des graminées. L’indicateur couramment utilisé est le Taux Annuel de Décroissance (TAD).

Au regard de ces éléments, les adventices ont été catégorisées en fonction de l’aptitude du labour à gérer leur potentiel d’infestation :

Efficacité du labour selon les adventices ciblées

Concernant les vivaces, le labour perturbe également le développement des organes végétatifs avec une efficacité néanmoins beaucoup plus aléatoire et variable selon les adventices. Dans le cas des laiterons et chardons, il peut être positionné après les déchaumages spécifiques à la gestion des vivaces (scalpages) pour enfouir les fragments et les épuiser. Le labour a alors pour effet d’étaler l’émergence des repousses. Dans le cas du rumex, il peut être contreproductif en rendant difficile l’extraction des racines.

Modalités techniques

Raisonner la fréquence et le positionnement du labour dans la rotation

Le labour ne doit pas être systématique, mais alterné avec du non-labour. Cette alternance dépend de la flore problématique de la parcelle (cf. adventice cible) et de la succession culturale. Le délai de retour du labour doit se faire lorsque la majorité des graines enfouies ont perdu leur viabilité. Une adventice avec un TAD (taux annuel de décroissance) de 70 % (ex : vulpin des champs) nécessite 3 ans pour que la proportion de graines viables atteigne 3%. Une adventice avec un TAD de 35 % (ex : chénopode blanc) nécessite 6 ans pour que la proportion de graines viables atteigne 8 %.

Rotation 1 : 

Illustration d’un labour positionné de façon à gérer les graminées automnales avec un délai de retour tous les 4 ans.

Proposition 1 de rotation avec 1 labour
Proposition 1 de rotation avec 1 labour. Source : Agro-Transfert

Rotation 2 : 

Illustration d’un labour positionné avant l’implantation des cultures de printemps, dans un objectif premier de structure du sol. Deux points de vigilance : (1) le délai de retour du labour est un peu juste pour la perte de viabilité des graines de graminées (encore plus pour les dicotylédones), (2) L’implantation du blé après les récoltes tardives nécessite certaines années un labour, réduisant encore le délai de retour.

Proposition 2 de rotation avec 2 labours
Proposition 2 de rotation avec 2 labours . Source : Agro-Transfert

Optimiser la date de passage de la charrue

Le labour peut remonter des graines enfouies du stock semencier encore viables. Éviter de labourer trop près de la date de semis permet de laisser une plage suffisamment importante pour réaliser des faux semis et éliminer des semences remontées à la surface.

Si la date de labour est proche du semis, éviter les conditions humides pour limiter la germination des graines remontées à la surface (Colbach et al. 2020).

Optimiser les réglages de la charrue et la vitesse d'avancement

Le réglage de la rasette (distance entre le soc et la rasette et position longitudinale des supports) est essentiel pour un bon enfouissement des graines superficielles.

réglages conseillés pour le labour
Réglage d'une charrue. Source : Brun, 2017

Limiter de la vitesse d’avancement à moins de 10 km/h permet de garantir un bon retournement et donc un enfouissement de la majorité des graines adventices.

Illustration des conséquences d’une rasette largeà vitesse trop élevée ou mal réglée
Illustration d'une charrue mal réglée. Source : Brun, 2017

Le reverdissement entre deux raies de labour en sortie hiver est un indicateur de mauvais réglages et/ou de vitesse excessive.

Efficacité et pertinence

Efficacité d'enfouissement des graines

Répartition des graines adventices à la suite d'un labour à 30cm de profondeur
Répartition des graines adventices à la suite d'un labour à 30 cm de profondeur (Colbach et al. 2006)

Les graines d’adventices sont réparties dans tout l’horizon travaillé avec une concentration supérieure dans les centimètres les plus profonds.

Attention, environ 10 % des graines restent dans les 5 premiers centimètres, profondeur compatible avec l’émergence de nombreuses adventices (Colbach et al. 2006).

Efficacité sur le développement de la flore

densité d'adventices selon la conduite. Source : Cordeau, 2019
Densité d'adventices selon la conduite. Source : Cordeau et al., 2019

Dans cette étude, la parcelle a été conduite en non-labour pendant 17 ans dont 7 ans en ACS (Agriculture de Conservation des Sols). Le blé labouré présente une densité adventice réduite de deux tiers par rapport au blé en travail du sol superficiel.

Schéma montrant la composition floristique selon la technique d'implantation de la culture
Composition floristique selon la technique d'implantation. Source Cordeau et al., 2019

La composition de la flore adventice diffère également selon les modalités de travail du sol. Cordeau et al. (2019) mettent en évidence une absence d’espèces prédominantes en système labouré, contrairement aux systèmes SD (prédominance de vulpin des champs) et TCS (prédominance de sanve).

Perspectives

Au-delà de la gestion adventice, le labour :

    • Augmente la durée de la fenêtre d’intervention pour les semis en cas d’humidité de surface, en comparaison avec le non-labour
    • Réduit le risque de certaines maladies : fusariose, piétin…
    • Nivelle le sol et enfouit les résidus.

MAIS :

    • Dilue la matière organique si le labour est réalisé en profondeur
    • Peut créer une semelle de labour
    • Est consommateur de temps et de carburant.

Sommaire

Pour aller plus loin

Protocole d’observation des annuelles

Protocole d’observation des vivaces

La biologie des adventices ciblées par cette pratique

Références bibliographiques

Brun D., 2017. Travail du sol – Bien régler sa charrue. Arvalis (https://www.arvalis.fr/infos-techniques/bien-regler-sa-charrue)

Chauvel B., Darmency H., Munier-Jolain N., Rodriguez A. coord., 2018. Gestion durable de la flore adventice des cultures. Editions Quae

Colbach N., Durr C., Roger-Estrade J., Chauvel B., J. Caneill J., 2006. AlomySys: Modelling black-grass (Alopecurus myosuroides Huds.) germination and emergence, in interaction with seed characteristics, tillage and soil climate

Cordeau S., Baudron A., P. Farcy P., Pouilly B., Mosa B., Chamoy P., Adeux G., 2019. Et si une impasse de désherbage en agriculture de conservation des sols poussait à retravailler le sol ? Quelle intervention choisiriez-vous ? Végéphyl – 24ème conférence du COLUMA